Mado Durand enseigne la préparation et la cuisine de la lamproie, à Sainte-Terre, en Gironde.
Elle apprend à l’ébouillanter, à la racler (pour enlever le limon), à la rincer, à l’essuyer, à la saigner, à la tronçonner, à la cuisiner : les travaux pratiques de Mado Durand, dont le mari, Gérard, pêcheur professionnel retraité, a laissé la place à Mickael, leur fils, ont lieu au Jardin de la Lamproie, à Lavagnac, commune de Sainte-Terre (33), le samedi matin –les trois prochains rendez-vous sont les 22 et 29 mars et le 5 avril 2014, le nombre de personnes par séance est de 10, le forfait est de 70 euros (inscriptions au Jardin de la Lamproie : 05 57 47 14 34).
Il existe encore un public qui recherche la confrontation avec l’animal serpentiforme à la bouche en forme de gouffre
La lamproie a cruellement manqué en février, les pluies ont pénalisé la pêche (trop d’eau et de courant dans les rivières), la saison, qui se terminera le 15 mai prochain, est lancée maintenant et la famille Durand met les bouchées doubles car, complément économique indispensable (la pêche est moins rémunératrice) Mado produit des conserves que Mickael vend sur le marché de Créon le mercredi matin et de Sainte-Foy-la-Grande le samedi matin (vente également à la maison familiale à Sainte-Terre : 05 57 47 17 14). Il propose également la lamproie fraîche à l’état brut (12 € le kilo) ou nettoyée, saignée et tronçonnée –il en coûte 3 € de plus-. S’il existe encore un public qui recherche la confrontation avec l’animal serpentiforme à la bouche en forme de gouffre -le succès des stages en est la preuve- le réflexe le plus commun est de simplifier le travail en achetant la lamproie prête à l’emploi.
Mais vous n’en avez pas fini pour autant car il faut cuisiner et de préférence bien. Le meilleur moyen d’y parvenir est de suivre la recette traditionnelle et de tenir l’innovation à distance. Voici comment procède Mado Durand : elle utilise un vin rouge côtes de castillon ou bordeaux supérieur (le vin jeune de l’année) qu’elle flambe (1 litre pour 1 lamproie de 1, 2 kilo) et dans lequel elle fait mijoter les blancs de poireaux (les choisir gros) qu’elle a fait revenir, bien dorés, avec 2 morceaux de sucre pour adoucir, 1 feuille de laurier, sel et poivre. Elle ajoute ensuite le sang et les morceaux de lamproie -des tronçons de la largeur de la main- et laisse mijoter 2 heures. Elle éteindra le feu qu’elle rallumera pour laisser mijoter encore 2 heures et renouvellera une fois l’opération.
La lamproie en conserve est-elle supérieure à la lamproie fraîche ?
« Il faut que la sauce s’épaississe, qu’elle soit sombre, liée, souple, onctueuse et que le poireau soit bien imbibé », prévient Mado qui recommande la cuisson sur deux jours et conseille de servir la lamproie fumante sur des rôties aillées nappées de la sauce.
La lamproie en conserve est-elle supérieure à la lamproie fraîche ? Le débat ne sera jamais tranché, chacun a ses partisans, Gérard Durand trouve que le vieillissement « apporte un autre goût, que le poireau est meilleur». Dans « Le livre de la lamproie » de Jean-Etienne Surlève-Bazeille (éditions confluences 25 €) Jean-Marie Amat dit sa préférence pour la lamproie fraîche (« les saisons, il n’ y a rien de mieux, ça remet naturellement dans l’attente, dans l’appétence ») et dit de la lamproie, quand elle est bien faite, « que c’est une chair moelleuse, un civet qui normalement est rustique mais ce civet a plus d’élégance, de grâce ».
Un article de Jacques Ballarin publié dans Le Mag Sud Ouest le samedi 15 mars 2014.