La japonaise Yuri Nagaya sert une cuisine infalsifiable, à l’Amateur de Thés (64), une adresse qui se mérite.
C’est redoutable, pour pouvoir être admis le vendredi soir ou le samedi soir à l’Amateur de Thés, rue Pasteur à Pau, il faut réserver au minimum 1 mois et demi avant. Explication : la cuisine y est étonnement, dans une ville où la gastronomie peine. La bonne nouvelle est le projet de déménagement rue de la République (face aux halles) prévu l’été prochain. Le nombre de couverts sera doublé (une vingtaine actuellement), Yuri Nagaya, la responsable du succès se prépare à cette évolution – une pâtissière et un chef, l’une et l’autre japonais, sont attendus début février. Joël Romuale, professionnel du thé et fin connaisseur du Japon – incollable sur le saké – a eu le bon réflexe de s’associer à elle pour créer, dans le salon de thé, ce restaurant inattendu qui ne désemplit pas.
Une double culture franco-japonaise au service d’une inspiration sûre et éveillée
Yuri, 39 ans, a appris la cuisine de l’Hexagone dans les restaurants français de Tokyo – la soupe à l’oignon, le fond de veau, le bœuf bourguignon lui sont familiers – et n’a jamais renoncé à « sa » culture – les cuissons, les ingrédients, les produits, les « arrangements » des saveurs ». La singularité de sa démarche réside dans cette double appartenance, cette double connaissance, cette double maîtrise, mises au service d’une inspiration sûre et éveillée.
Elle tient à distance la cuisine fusion d’assemblage et d’empilements, facile et à faible valeur gustative, accordant une attention extrême au produit sélectionné qu’elle explore et valorise dans une interprétation personnelle inimitable. Le menu dégustation servi le soir (65 €) appelé « omakase du shiwasu » (traduisez « entière confiance au chef ») est édifiant.
Ainsi du calamar, version pot-au-feu, à la texture molle et rustique, rehaussé par un bouillon vif et parfumé (copeaux de bonite et algue séchée) ; ainsi de la magistrale sauce huître et anchois qui accompagne le merlu poêlé à la cuisson incroyable et la purée de chou-fleur ; ainsi du trio de biche proposé en trois textures différentes, associé à l’aillet, à des légumes racines et au riz, un plat gourmand et inédit avec lequel il est conseillé de boire un saké comme il y a 100 ans, avec du corps et de la mâche, de la sucrosité et de l’acidité –la parenté avec le vin jaune du Jura est bluffante.
Joël Romuale vous recommandera un saké doux et distingué pour accompagner les deux desserts qui ponctuent le menu, le sorbet à la mangue et orange sauce au thé Chaï et la bûche au thé Hôji cha crème au chocolat noir et blanc, crumble au cacao et tapis d’ananas. Fraîcheur, pureté, délicatesse et harmonie, sont les vertus de ces deux créations. Le midi est servi un menu du jour à 22 €, de la même veine que le menu dégustation. Carte des vins bien fournie, en blanc notamment. Belle sélection de whiskies japonais, de sakés et de thés.
Un article de Jacques Ballarin publié dans Sud Ouest le Mag le samedi 16 janvier 2016. Photo David le Déodic.
L’Amateur de Thés, 22, rue Pasteur à Pau. Tél. 05 59 32 81 06
Un commentaire sur "Des sensations neuves chez « L’amateur de thés » à Pau"
Sans aucune hésitation, et avec un enthousiasme renouvelé des papilles, le MEILLEUR restaurant de Pau, Yuri ne cesse de nous émerveiller et de nous étonner,
un très grand chef dans un rue mal connue de Pau, mais qui vaut le détour, que dis-je le détour, le voyage!
Merci encore pour votre inventivité et votre talent , dignes de ceux de la Babette du grand film de Gabriel Axel , auquel je pense à chaque fois que je m’installe à l’Amateur de Thés pour un partage de plaisirs vrais et magnifiques.