Christian Dreyfus interprète une cuisine bien à lui au Fou à pieds rouges, dans le port de plaisance.
Citoyen américain de Californie, Christian Dreyfus a deux bonnes raisons d’avoir jeté l’ancre à Capbreton : ses souvenirs de surfeur et sa rencontre avec Marion, une Nantaise, amoureuse de Soustons, la ville de sa grand’mère. Les rendez-vous avec la vie ne sont pas toujours là où on les attend, le couple s’est connu au Nicaragua et a donné au restaurant du quai de la Pêcherie le nom inédit d’un oiseau marin des îles et des côtes océaniques tropicales, le fou à pieds rouges.
Christian Dreyfus est un autodidacte, le surf et les petits boulots (le service en salle) occupaient son existence, le déclic pour la cuisine s’est produit le jour où il remplaça un commis et découvrit qu’il fallait de l’énergie derrière les fourneaux et qu’il s’agissait d’un vrai métier. Ajoutez à cette révélation la lecture des livres de Thomas Keller, le chef américain couronné par le guide Michelin (deux adresses 3 étoiles), l’envie de progresser et d’entreprendre, et vous avez la clé de l’engagement du Californien qui, après avoir fait ses premières armes aux Etats-Unis, partit ouvrir un restaurant au Nicaragua.
La singularité ici réside dans l’inflexion de la cuisine qui, sans verser dans l’exotisme, offre une petite note de dépaysement
Son installation à Capbreton date de février 2014 et, sans avoir l’air d’y toucher, Christian Dreyfus est devenu une référence locale. Explication : l’assiette est sincère, les propositions changent tous les dix jours et les prix ne dérapent pas. Le Fou à pieds rouges est de la même veine que le Scaphandre, O’petits Oignons, Ma Cuisine, ces adresses capbretonnaises simples et gourmandes où on en a pour son argent. La singularité ici réside dans l’inflexion de la cuisine qui, sans verser dans l’exotisme, offre une petite note de dépaysement en relation avec l’origine américaine du chef.
Ainsi de la poêlée de magret de canard –des morceaux bien épais- servie avec du raisin, du fenouil, de la sauge et une purée de butternut, un plat surprenant nullement loufoque. Le magret est traité comme une viande rouge, l’accompagnement, parfumé, le contraste en bouche de la purée de butternut, douce et onctueuse, apportent des sensations neuves et ôtent au magret son caractère abrupt. Idem pour la lotte à la crème qui profite de l’ambiance air de soupe américaine créée par son association avec des moules, de la pomme de terre, des lardons, des carottes, du céleri et de l’estragon. L’onglet de bœuf, réglementaire, prend du galon sous la triple influence de la purée de pommes de terre, des chips de choux de Bruxelles (une trouvaille bien vue) et du beurre à l’os à moelle fabrication maison : Christian Dreyfus rôtit les os à moelle, enlève la moelle et le gras, ajoute échalote ail et persil, laisse transpirer et mixe avec un beurre demi sel.
On recommandera également le filet de merlu proposé avec une purée au citron, des endives à l’orange et du basilic. Les desserts sont soignés, le granité de raisin muscat au romarin et la poire pochée crème à l’amaretto amandes copeaux de chocolat, se remarquent.
Carte des vins courte avec plusieurs bouteilles à moins de 20 € comme le bordeaux le plaisir des arnauds 2012 (16 €). Compter à la carte 30-35 €. Terrasse avec vue sur le port de plaisance.
Un article de Jacques Ballarin publié dans Sud Ouest Le Mag du 24 octobre 2015. Photo Xavier Ges.
Le Fou à pieds rouges, 1, quai de la Pêcherie 4013O Capbreton. Ouvert le midi le samedi et le dimanche et le soir du mercredi au samedi. Tel : 09 82 28 30 96.