L’exposition « Ripaillons » de la Bibliothèque municipale de Bordeaux, consacrée jusqu’au 19 juillet 2014 au repas gastronomique des Français, est l’occasion de s’intéresser aux menus. Les plages cartonnées qui ornent les tables depuis des siècles sont mises à l’honneur.
Interview de Caroline Poulain, conservatrice patrimoniale aux bibliothèques municipales de Dijon et spécialiste de l’histoire des menus.
Comment vous intéressez-vous à l’histoire des menus ?
Les bibliothèques municipales de Dijon disposent de collections classiques importantes ainsi que de fonds patrimoniaux originaux. En particulier, la bibliothèque développe un fonds « gourmand » depuis une trentaine d’années, autour de la gastronomie et du vin. Se construit aussi, depuis 2009, une des plus grandes collections de menus.
Au-delà de la succession de plats, quelles informations apporte un menu ?
Les intérêts du menu sont très divers. En termes historiques, le menu renseigne de l’évolution de la gastronomie, des plats. Il illustre aussi l’évolution de la vie quotidienne.
Par exemple, l’étude de l’iconographie informe sur l’évolution du mariage. On voit bien que le mariage est passé d’un rite très strict à un évènement bien plus familial aujourd’hui.
Le « trou normand » est, par exemple, renommé « trou allié » durant la Première guerre mondiale
Les menus mettent aussi en perspective les grands évènements historiques car la plupart d’entre eux se sont clos par des dîners d’État. Nous nous intéressons aujourd’hui particulièrement aux menus de la période 1914-1948. Des noms de plats de cette époque sont très évocateurs des évènements. Le « trou normand » est, par exemple, renommé « trou allié ».
L’illustration des menus apporte également des informations sur le travail de l’imprimeur et dans une plus large mesure de l’histoire de l’Art. Les menus renseignent aussi l’histoire de la publicité puisque, pendant longtemps, les grandes marques finançaient les cartes.
Est-ce l’Histoire qui fait les menus ou les menus qui font l’Histoire ?
Les menus traduisent une époque, l’Histoire fait donc les menus. Ils sont véritablement apparus avec le passage du service à la française –les buffets- au service à la russe – à l’assiette. Les conviés se sont alors servis des menus pour savoir s’ils pouvaient sauter ou non un plat.
Si c’est l’Histoire qui fait les menus, tous les grands évènements ont un repas. Par exemple, quand un président de la République reçoit un hôte de marque, un dîner d’état a lieu. Un menu traduit cet évènement et nous laisse ainsi une marque.
Qu’apporte l’exposition bordelaise « Ripaillons » quant à l’histoire des menus ?
Plusieurs menus sont exposés lors de l’évènement. Je tiendrai une conférence le 5 juillet 2014 à la bibliothèque municipale de Bordeaux sur l’histoire des menus. J’invite les visiteurs à découvrir sur le site internet de la bibliothèque municipale de Dijon les menus et les articles de nos livres, accessibles librement.
Nicolas Rinaldi
Exposition « Ripaillons », du 20 mai au 19 juillet 2014 à la Bibliothèque Mériadeck de Bordeaux.
Salle d’expositions, niveau rez-de-rue
85, cours du Maréchal Juin 33000 Bordeaux
05 56 10 30 00, bibliotheque.bordeaux.fr
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