Nicolas Durif est en train de faire de l’Hysope, à La Jarrie (17), à côté de La Rochelle, une destination gastronomique.
Voici une adresse, à l’accès caché, une ruelle, qui se mérite et dont on devient l’ami dans l’instant. Le jardin minéral est adorable, la salle à manger est chaleureuse (les couleurs, la décoration, le soin de la table), le chef, Nicolas Durif, décomplexé, assume ses origines (l’Alsace), son amour de la corrida et de Nîmes. Pas de méprise, il est heureux en Charente-Maritime, le pays de sa femme, bijoutière à La Rochelle et savoure son installation à La Jarrie, une commune distante d’une dizaine de kilomètres de la cité maritime.
La crème de chou-fleur est servie noire, la trouvaille est l’encre de seiche qui joue le rôle de condiment
L’assiette, inattendue et gourmande, a du talent. C’est toujours risqué de bousculer les codes culinaires en province sauf que, quand la sincérité transpire, que le dressage de l’assiette donne envie, que les nouveaux « arrangements » des produits, des ingrédients, des goûts, des saveurs, tombent juste, tout le monde adhère, les anciens et les modernes. A l’Hysope (le nom d’une plante qui pousse dans la garrigue, plus amère que le thym et l’origan) aucun plat n’échappe à la manière éveillée du chef, jamais en panne d’une association, d’un rapprochement, d’un clin d’œil.
La crème de chou-fleur est servie noire, la trouvaille est l’encre de seiche qui joue le rôle de condiment sans abîmer la personnalité gustative du chou-fleur ; le mariage avec les croûtons de choucroute (la note alsacienne), les huîtres lardées et le caviar de hareng, est bien vu. Idem pour la croûte de betterave qui accompagne le dos de cabillaud exactement comme un assaisonnement pour l’acidulé. La mousseline de patates douces aux épices « pousse » le cabillaud et flirte idéalement avec le butternut confit.
On conseillera le baba au pineau des Charentes
Pas de limites pour Nicolas Durif qui propose le pavé de bar aux agrumes avec un risotto de racines de persil au lait de coco, le pavé de maigre cuit à la plancha avec un guacamole chaud et un coulis de carottes, la terrine de foie gras au piment de la Jamaïque et à la confiture de pastèque. Le chef acclimate l’aligot au vieux cantal avec la poitrine de cochon basse température au soja et ose, aux portes de l’océan, le filet de taureau (plusieurs semaines de maturation) cuit saignant à la Saint-Gilloise (câpres, oignon, échalote, cornichon, réduction de crème de céleri) flanqué d’un beignet d’anchois.
Pour les desserts on conseillera le baba au pineau des Charentes servi avec une onctueuse crème de citron, un bonbon de pomelos et un sorbet kalamansi (petit agrume philippin). Le menu à 33 € est le bon plan (menu à 50 € également et menu dégustation à 65 €). Le midi, du mardi au vendredi, menu à 22,50 € : entrée/plat ou plat/dessert à 18,50 €, plat/café à 15,50 €.
La carte des vins se démarque : on signalera le pinot gris Hospices de Strasbourg domaine Xavier Muller 2012 (50 €), le Bourgogne Mâcon-Villages « Domaine des terres de Chatenay » 2014 (36 €) et le Saint-Emilion grand cru la Dame de onze heures 2012 (107 €).
Un article de Jacques Ballarin publié dans le Mag Sud Ouest du samedi 21 novembre 2015. Photo Pascal Couillaud.
L’Hysope, 25, rue de l’Aurore (accès ruelle des deux Places) à La Jarrie. Tél. 05 46 68 52 21