Eneko Atxa Azurmendi détient 3 étoiles. Le site et le restaurant, à Larrabetzu, près de Bilbao, sont en cohérence avec l’assiette, précise et épurée
« Un lieu où le plaisir identitaire deviendrait universel ». Eneko Atxa Azurmendi, 36 ans, a rejoint en 2012 les chefs les plus titrés du pays basque espagnol, Juan Mari et Elena Arzak, Pedro Subijana et Martin Berasategui (3 étoiles dans le guide Michelin). Mais ce Biscayen d’Amorieta, localité proche de Bilbao, peu bavard, timide et solitaire, ne recherche pas la lumière. Pour lui, la seule qui vaut est celle de la province de Biscaye (la « petite patrie », les racines) qui irradie le restaurant paysager et transparent (un eco-bâtiment imaginé par l’architecte espagnol Naia Eguino) posé à flanc de colline, au-dessus de la vallée de Txoriemi. La pierre, le bois, le fer, la nature, l’assiette, jouent le rôle de miroir, la cohérence est totale, l’expérience, unique, reflète celle de chez Michel Bras, à Laguiole, le génie du lieu dicte l’essence de la cuisine.
Une mallette de pique-nique vous attend avec des bouchées gourmandes avant de prendre la direction de la cuisine
La visite à Azurmendi (le nom du restaurant) débute par un parcours initiatique qui mène du potager – avec dégustation de tomate, de carotte, de potiron, avec une pointe de cherry, de vinaigre balsamique, de fleur d’ail- à l’atrium végétal et minéral, entrée du restaurant et symbole. Une mallette de pique-nique vous attend avec des bouchées gourmandes avant de prendre la direction de la cuisine où la brigade, à votre arrivée, adresse un « agur » retentissant. Ici, ce sera dégustation le verre à la main de boudin fondant et de jus de haricots rouges. Vous êtes accompagné à votre table (12 au total, volontairement espacées) et découvrez la salle, haute et large, avec sa façade en verre, sa lumière naturelle, sa vue sur la vallée.
Les menus dégustation coûtent 135 euros et 160 euros, des tarifs 3 étoiles nettement inférieurs aux prix pratiqués en France
La cuisine d’Eneko Atxa Azurmendi, en prise avec un environnement vivant et palpable, est sobre et créative. Le chef, qui déteste être distrait pendant le service (la caméra est récusée, l’appareil photo rarement toléré) est perfectionniste, calme, concentré. Il analyse les gestes de la brigade sûre de son art dans le protocole de la grande transformation technique. Le Biscayen acclimate la modernité et la tradition, et rien n’est gratuit dans les associations de produits.
Les « arrangements » des saveurs ont du sens, le détail est le luxe suprême. Mais l’éclat de l’assiette demeure le goût. Ainsi du jaune d’œuf à l’envers et de la truffe ; du jus de l’oursin de mer inoculé dans un cocktail composé de jus de tomate, de vodka, de poivre noir, de céleri ; de l’émulsion d’huile de ciboulette avec le tartare de homard mariné ; du sel volcanique noir avec la mousse de foie gras et la mie de pain croquant. Ou, plat terre et mer rustique emblématique de la Biscaye, de l’union, juste et puissante, de l’asperge, de l’échalote, du jus de pied de porc, du bonbon liquide au fromage Idiazabal (fromage au lait de brebis) et de l’anchois salé. Ou encore de la glace cerise avec l’amande rôtie, la menthe et la framboise.
La carte des vins, remarquable, est accessible. Les menus dégustation coûtent 135 euros et 160 euros, des tarifs 3 étoiles nettement inférieurs aux prix pratiqués en France.
Article de Jacques Ballarin publié dans le Mag Sud Ouest du samedi 07 juin 2014. Photo Philippe Taris.
Restaurant Azurmendi à Larrabetzu (autoroute direction Bilbao sortie 25). Tél. 0034 944 558 866