À La Rochelle, Ze Bar s’est fait un nom avec 250 vins « vivants ». Porté par le succès, une seconde adresse est née, ouverte midi et soir.
«Tu penses à quoi comme vin du jour ? » Il est 11 h 30, ce mardi, et la serveuse interpelle Philippe Darmon. Le patron de Ze Bar à La Rochelle a inauguré en fin d’année dernière un second établissement de ce nom, à côté du marché central. Le petit nouveau est ouvert midi et soir, contrairement au premier, réservé aux dîners (jusqu’à 2 heures du mat’). Un menu du marché « J’achète tout à côté » pour 18 euros, qui change tous les jours, comme le vin…
« On a quoi, aujourd’hui ? Hachis, volaille… Mets un Château Plaisance, un fronton », propose Philippe Darmon, amateur de « vins nature ». Une appellation que le quinquagénaire préfère à celle de « bio ». « Tous les vignerons n’ont pas l’envie ou les moyens de demander le label », comme l’explique aussi très bien la bande dessinée « Les Ignorants ». Étienne Davodeau y raconte le travail d’un vigneron de la vallée de la Loire dont les produits font partie des meilleurs. Comme ceux de son voisin Bruno Rochard, que l’on trouve à la carte de Ze Bar.
À deux pas du Vieux-Port rochelais, l’adresse est devenue incontournable. Et le patron peut s’y lâcher
Ses 250 références, Philippe Darmon va les chercher là où il « aime le vin », pourvu que le vigneron ne fasse pas d’ajouts. Surtout pas d’engrais chimiques ni de soufre, ou peu. Le week-end dernier, ce passionné s’est ainsi plongé deux jours durant dans un des plus importants salons français du genre, La Dive Bouteille, à Saumur. « J’y vais depuis la première édition, salue l’ancien Parisien qui s’est installé à La Rochelle. J’avais proposé à mon associé d’alors : “C’est La Rochelle, La Rochelle ou La Rochelle.” » Après une aventure de deux ans avec celui-ci – aujourd’hui à la tête d’une autre jolie table (voisine), La Cuisine de Jules -, Philippe Darmon parie en 2007 sur un bar à vins, rue de la Chaîne.
« Une cave à manger, la première de La Rochelle, revendique-t-il. J’ai galéré deux ans, les gens ne comprenaient pas le fait de venir pour le vin. »
En ajoutant une vraie offre restauration (menu à 23 euros), l’ancien patron de La Robe et le Palais, à Paris, fait décoller son affaire. À deux pas du Vieux-Port rochelais, l’adresse est devenue incontournable. Et le patron peut s’y lâcher.
Philippe Darmon n’hésite pas à choquer certains clients non avertis en secouant le vin avant de le servir
« C’est moi qui choisis le vin », se marre Philippe Darmon. Autodidacte de la vigne mais assidu de la formation continue, il part vendanger une fois l’an, « le temps d’un week-end », chez l’un de « ses » vignerons auxquels il rend des visites régulières. « Je connais tous les bonshommes qui sont derrière les vins que je sers ».
Un service au ton souvent truculent – le patron dit « nous » en parlant de ses produits et secoue certaines bouteilles avant de verser : « Ils ne sont pas totalement dégazés avant d’être embouteillés, pour éviter de mettre du soufre », s’excuse-t-il, même s’il choque certains clients non avertis en malmenant ainsi le précieux breuvage.
Mais la majorité vient pour ça. En grand nombre. « On fait 50 % de notre chiffre d’affaires avec le vin, quand c’est plutôt 20/80 dans un restaurant traditionnel », reconnaît Philippe Darmon, qui cherche à recruter deux sommeliers. Un succès reconnu par les fidèles. « Je fais de la vente à emporter, précise le patron, mais seulement si le client a déjà goûté le vin ici. » Histoire de savoir l’apprivoiser.
Ze Bar, rue de la Chaîne et rue des Cloutiers à La Rochelle.
Article de Stéphane Vacchiani paru dans Sud Ouest le 06 février 2014.